Gameloft, la référence du jeu mobile

À la fin des années 90, alors que l’industrie du jeu vidéo est en plein essor, une mutation encore discrète se prépare. Tandis que les consoles de salon et les PC dominent le marché, un nouveau terrain commence à émerger : celui des jeux mobiles. C’est dans ce contexte que Michel Guillemot, co-fondateur d’Ubisoft, perçoit une opportunité encore inexploitée.  Convaincu que les téléphones portables deviendront des supports incontournables pour le divertissement, il fonde Gameloft en décembre 1999.

L’objectif est clair : se positionner comme un pionnier du jeu mobile en anticipant l’évolution du marché. À cette époque, les jeux sur ce support se résument à des expériences rudimentaires comme le célèbre Snake sur Nokia. Gameloft ambitionne d’aller beaucoup plus loin en développant des titres plus riches, à la fois en termes de gameplay et de graphismes, malgré les contraintes techniques des téléphones. Et ce pari audacieux va rapidement porter ses fruits.

Gameloft sait que la clé du succès réside dans l’accessibilité. Contrairement aux jeux sur consoles et PC qui nécessitent du matériel dédié, et souvent coûteux, les téléphones mobiles sont quant à eux beaucoup plus accessibles. Mais encore faut-il exploiter leur potentiel vidéoludique malgré les capacités techniques limitées du début des années 2000.

C’est pourquoi le studio adopte très tôt les technologies Java et Brew, qui permettent aux téléphones d’exécuter des jeux plus riches que les simples pixels monochromes de l’époque. Grâce à ces plateformes, Gameloft peut proposer des expériences relativement proches des jeux sur consoles, avec des graphismes détaillés et une véritable profondeur de gameplay.

Mais si Java et Brew ouvrent la voie, l’arrivée des smartphones représente un tournant décisif. Avec l’essor des écrans tactiles et l’apparition de l’App Store d’Apple en 2008, les règles du jeu changent complètement. Gameloft est l’un des premiers studios à embrasser cette révolution en adaptant rapidement ses licences phares aux nouvelles possibilités offertes par l’iPhone et les téléphones Android. Loin de se laisser dépasser par l’explosion du marché mobile, l’éditeur en fait son principal terrain de jeu en repoussant sans cesse les limites de ce que les smartphones peuvent offrir en termes d’expériences vidéoludiques.

En 2016, Gameloft entre dans une nouvelle phase de son histoire avec le rachat de la majorité de ses parts par le géant des médias Vivendi. Ce rapprochement s’inscrit dans une stratégie plus large de l’entreprise mère visant à renforcer son influence dans l’industrie du jeu vidéo, une ambition qui se manifeste également par ses tentatives de prise de contrôle d’Ubisoft, à la même période.

Pour Gameloft, cette acquisition représente un vrai tournant stratégique. Jusqu’alors, le studio fonctionnait de manière indépendante et façonnait son identité autour du jeu mobile. Avec l’arrivée de Vivendi, les enjeux deviennent plus grands : le groupe veut exploiter les synergies entre ses différentes entités (Canal+, Universal Music Group, etc) pour créer un écosystème de divertissement connecté, où le jeu mobile occupe une place centrale.

Si ce changement suscite des interrogations quant à l’avenir du studio, il offre également à Gameloft de nouvelles opportunités de croissance, notamment grâce aux ressources et à

la puissance financière de Vivendi. Désormais intégré à un conglomérat multimédia, le studio peut envisager des projets plus ambitieux et explorer de nouveaux territoires en dehors du jeu mobile.

L’un des premiers effets visibles de cette acquisition est la diversification des supports et des modèles de jeu. Si Gameloft reste fidèle à son coeur de métier – le jeu mobile –, l’éditeur commence à s’intéresser davantage aux consoles et au PC en cherchant à adapter certaines de ses franchises à un public plus large. Cette transition se concrétise notamment avec la sortie de Modern Combat 5: Blackout sur PC via Steam.

En parallèle, les collaborations avec des franchises de renom se multiplient et renforcent la visibilité et l’attractivité des jeux Gameloft. Le studio décroche ainsi d’importants partenariats avec des licences prestigieuses, comme Disney Magic Kingdoms (un jeu de gestion basé sur l’univers des parcs Disney) ou encore LEGO Legacy: Heroes Unboxed. Ces alliances permettent de capitaliser sur des licences mondialement connues pour maximiser l’impact commercial des jeux.

Sous l’impulsion de Vivendi, Gameloft se transforme progressivement et cherche à s’émanciper de l’image du « simple » studio de jeux mobiles pour s’affirmer comme un acteur phare du divertissement vidéoludique. En s’adaptant aux évolutions du marché et en diversifiant ses activités, le studio affirme sa capacité à se réinventer sans renier son ADN, un équilibre subtil qui lui permet de rester compétitif dans une industrie en perpétuelle mutation.

L’un des atouts majeurs de Gameloft réside dans sa maîtrise technologique et sa capacité à optimiser ses jeux pour des supports variés. Pour garantir des performances optimales sur mobile, le studio a longtemps développé ses propres moteurs de jeu, lui permettant d’exploiter au mieux les capacités des smartphones et tablettes. Toutefois, le studio n’a pas hésité à s’appuyer sur des moteurs commerciaux lorsque cela s’avérait pertinent, comme l’Unreal Engine 3, utilisé sur plusieurs jeux à partir de 2011.

Cette double approche technologique permet au studio d’optimiser l’utilisation des ressources des appareils mobiles et de garantir des graphismes fluides et détaillés, même sur des configurations plus modestes. Cela se traduit par des effets visuels soignés, une gestion avancée de la physique et des animations réalistes, des éléments qui contribuent à l’identité visuelle des jeux Gameloft.

L’exemple le plus emblématique de cette expertise est sans conteste la série Asphalt. Depuis Asphalt: Urban GT, sorti en 2004, jusqu’à Asphalt 9: Legends, Gameloft n’a cessé d’élever les standards du jeu de course sur mobile. Asphalt 9 pousse encore plus loin le réalisme avec des textures détaillées, des effets de lumière dynamiques et une animation ultra-fluide, rivalisant avec certaines productions sur console. Grâce à cette ambition graphique et technique, Gameloft prouve que le réalisme et la performance ne sont plus réservés aux PC et aux consoles, mais peuvent aussi exister sur mobile.

Lorsqu’on évoque Gameloft, la franchise Asphalt est sans doute l’une des premières à venir à l’esprit. Née en 2004 avec Asphalt: Urban GT, cette série de jeux de course arcade s’est imposée au fil des années comme une référence du genre sur mobile, rivalisant avec certaines licences emblématiques comme Need for Speed.

Chaque nouvel opus a apporté son lot d’innovations, tant sur le plan graphique que du gameplay. Si les premiers épisodes utilisaient des graphismes en 2D simplifiés pour s’adapter aux capacités limitées des téléphones de l’époque, Gameloft a rapidement franchi un cap avec Asphalt 5 et Asphalt 6: Adrenaline, introduisant des environnements en 3D détaillés et des effets de vitesse spectaculaires.

Avec Asphalt 8: Airborne, la franchise atteint un niveau technique impressionnant : moteur physique avancé, sensations de conduite améliorées et introduction des sauts et cascades, qui dynamisent l’expérience de jeu. Mais c’est Asphalt 9: Legends qui marque l’apogée de la série, avec des graphismes rivalisant avec ceux des consoles, une gestion ultra-réaliste de la lumière et des conditions météorologiques, ainsi qu’un système de contrôle innovant, le « TouchDrive », conçu pour simplifier la prise en main tout en conservant une profondeur stratégique.

Grâce à cette évolution constante, Asphalt s’est imposé comme l’un des jeux de course les plus populaires au monde, cumulant des millions de téléchargements et restant un pilier de l’offre Gameloft.

Si Asphalt domine le marché du jeu de course sur mobile, Gameloft a également marqué les esprits dans le genre hack-and-slash avec Dungeon Hunter. Lancée en 2009, cette franchise s’inspire des grands classiques du RPG action comme Diablo, tout en proposant une expérience optimisée pour les smartphones.

Dès son premier opus, Dungeon Hunter séduit par son gameplay nerveux, sa progression gratifiante et son univers médiéval-fantastique immersif. Le joueur incarne un héros chargé de combattre des hordes d’ennemis à travers divers donjons, en améliorant son équipement et ses compétences au fil de l’aventure.

Avec Dungeon Hunter 3, Gameloft introduit un modèle free-to-play avec microtransactions, permettant d’étendre la durée de vie du jeu et de proposer des mises à jour régulières. Dungeon Hunter 5 et Dungeon Hunter 6 affinent encore plus l’expérience, en introduisant un mode multijoueur coopératif, une progression plus étoffée et un design visuel plus travaillé.