Retour sur le parcours extraordinaire de Michel Ancel, créateur de jeux vidéo

Fils d’un père militaire, Michel Ancel voyage d’un pays à l’autre. Cela ne l’empêche pas de nourrir une passion pour les jeux vidéo dès son plus jeune âge. Il découvre pour la première fois le jeu vidéo en Tunisie à travers l’Atari 2600 d’un ami.

Il devient familier des ordinateurs Atari : le 600 XL et le 520 ST. Michel Ancel apprend également à coder grâce à un magazine français Hebdogiciel. En découvrant la programmation, Michel Ancel s’intéresse à la création et ne veut plus être un simple joueur.

En 1989, le jeune homme retient l’attention des patrons d’Ubisoft à seulement 17 ans grâce à ses talents d’animateur. Pendant ses premières années chez le géant français, il travaille sur des projets comme Brain Blasters, The Intruder ou encore Pick’n Pile. Il endosse plusieurs rôles dans ces jeux : programmeur, concepteur sonore ou encore graphiste.

Les frères Guillemot, le dirigeant d’Ubisoft, remarquent son implication et l’autorisent à présenter ses propres idées. C’est ainsi qu’il va travailler sur son premier jeu, à savoir Rayman.

Le jeu Rayman sort en 1995. Michel Ancel est impliqué en tant que concepteur principal et réalisateur. Le jeu met en scène Rayman, le héro qui doit sauver le monde de l’antagoniste, Mr. Dark. Ce jeu à défilement latéral en 2D suscite l’engouement des joueurs grâce à son originalité. Son gameplay et ses mondes colorés ont fait l’unanimité. Rayman est sorti sur Sega Saturn, PC, Atari Jaguar et Playstation.

Dans Rayman, Michel Ancel a démontré sa créativité. Dans un interview, il avoue que les animateurs comme Tex Avery et Hayao Miyazaki étaient ses sources d’inspiration pour le jeu.

Conscient du succès, Ubisoft demande à Ancel de développer la suite. A l’époque, l’industrie des jeux vidéo délaisse le 2D pour la 3D. Cela pose un défi de taille pour le concepteur : créer une suite en 3D d’un jeu de plateforme en 2D.

Entre temps, Ancel travaille sur d’autres projets comme Tonic Trouble, sorti sur PC et Nintendo 64. Ce nouveau jeu s’inspire fortement de l’univers de Rayman, notamment pour les personnages. Son équipe travaille sur le projet pendant un an à travers un moteur de jeu destiné à la 3D.

Au bout d’un an, l’équipe de Michel Ancel laisse le développement à Ubisoft Montréal, mais conserve le moteur pour leur suite de Rayman.

À l’époque, Super Mario 64 était considéré comme une prouesse technologique de la réalisation 3D. Le concepteur puise l’inspiration dans la franchise de Nintendo pour créer son propre univers.

Ancel et son équipe ont acquis l’expérience du moteur 3D grâce à Tonic Trouble. Le développeur prévoit donc de remanier son jeu. Il ajoute un ton plus sombre à l’univers et augmente les enjeux.

Le projet se heurte à un nouveau défi lorsque Ubisoft veut ajouter le « tank controls » au jeu. Ce système désigne le contrôle du personnage par le joueur via les touches fléchées (D-pad). Des titres importants comme Tomb Raider l’ont déjà adopté.

Malgré les souhaits d’Ubisoft, Michel Ancel s’y oppose et veut utiliser le contrôle analogique comme dans Super Mario 64. Sa décision porte ses fruits puisque cela a offert aux joueurs une expérience plus fluide. Le concepteur a prouvé à ce moment de sa carrière son expertise.

À sa sortie, le jeu reçoit des critiques élogieuses. Les médias spécialisés saluent son exécution de jeu et sa conception impressionnante.

Malgré la préparation d’un troisième volet de Rayman, Michel Ancel n’est plus impliqué dans le projet. Les joueurs ont eu du mal à reconnaître l’univers de la franchise à cause de son absence. Néanmoins, le concepteur travaillait sur un autre titre à l’époque : Beyond Good & Evil. Il considère ce jeu comme le plus important projet de sa carrière.

Le jeu met en scène Jade, une héroïne qui est à la fois photographe et gardienne. Plus sophistiqué que ces anciennes créations, le jeu se déroule dans un monde plus inquiétant. Le gameplay mélange le journalisme et les enquêtes sur un fond de complot mondial.

Contemplatif et engagé, le jeu reçoit des critiques positives à sa sortie en 2003. Certains médias l’ont même élu comme le meilleur de l’année. Malgré cet accueil chaleureux, les ventes ne sont pas à la hauteur avec moins d’un million d’exemplaires écoulés.

L’échec commercial de Beyond Good & Evil constitue une tache noire dans la carrière de Michel Ancel. Ubisoft met en suspens plusieurs projets malgré l’annonce d’une suite. Le développeur se retrouve alors à la tête du 4ᵉ volet de Rayman.

Annoncé comme une aventure grandiose et loufoque, Rayman et les lapins crétins déçoit les fans de la première heure. Pire, le héros se fait voler la vedette par les Lapins Crétins qui créent leur propre franchise.

Cependant, Michel Ancel va faire la rencontre de Peter Jackson qui était un admirateur de son travail. Ce dernier le choisit pour adapter le film King Kong en jeu vidéo. L’équipe de Michel s’envole aussitôt en Nouvelle-Zélande pour s’imprégner de l’univers du film.

Bref, Michel Ancel a marqué l’histoire des jeux vidéo grâce à sa créativité. Il a su développer des mondes féeriques et originaux. Selon lui, la conception de jeu doit rester un plaisir pour éviter d’aliéner la créativité. En 2006, le ministère de la Culture et de la Communication le fait chevalier des Arts et des lettres en reconnaissance de son talent. Il est l’une des rares personnalités du monde vidéoludique à recevoir cette distinction aux côtés de Shigeru Miyamoto.