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Guide du Jeu Vidéo

Quelle est l’histoire de SuperCell, le studio derrière l’immense Clash of Clans ?

Doit-on mettre de côté la morale pour maintenir sa boîte au sommet ? Si les plus grands noms de l’industrie du jeu vidéo se sont la plupart du temps bâtis dans le mépris d’une certaine éthique, quelques acteurs restent capables de garder l’humain au centre de leurs enjeux. Le géant du mobile SuperCell est de ceux-là : fort d’une culture d’entreprise iconoclaste tout en étant pragmatique, le studio finlandais est non seulement parvenu à atteindre le succès, mais aussi à le conserver pendant plus de dix ans. Découvrons comment le créateur de Clash of Clans et Clash Royale est parvenu à tirer son épingle du jeu sans trahir ses idéaux.
Maxence Jacquier
Par Maxence Jacquier
Journaliste
Contenu mis à jour le
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Du jeu mobile au jeu Facebook…

Tout juste la vingtaine, le finlandais Ilkka Paananen remarque, avec plusieurs acolytes de sa génération, le grand succès de l’i-mode au Japon. Concurrente du Wap, cette technologie de réseau internet sur mobile ouvre un nouveau champ d’application en cette fin de XXe siècle. En 2000, ce jeune ingénieur informatique se lance tout de suite dans l’entrepreneuriat avec Sumea Interactive, un studio de développement de jeux vidéo à destination des premiers téléphones portables connectés.

Ilkka Paananen, qui travaille sur un carton au lancement de SuperCell en 2010 (crédit : SuperCell)

Ilkka Paananen, qui travaille sur un carton au lancement de SuperCell en 2010 (crédit : SuperCell)

Bien avant l’avènement du smartphone, évangélisé par Apple sept ans plus tard, la petite boîte prospère grâce à différents partenariats avec les géants des télécoms du monde entier. En 2003, la société réalise 1,2 million d’euros de profits : suffisant pour aiguiser les appétits de plus gros acteurs qui n’ont pas saisi, si tôt, le potentiel de ce secteur encore très balbutiant. Dès 2004, Sumea est racheté par Digital Chocolate, et par son CEO Trip Hawkins dont on relate les aventures dans notre rétrospective sur Electronic Arts.

Avec son compère Mikko Kodisoja, Ilkka Paananen reste au sein de la structure jusqu’en 2010, où le besoin d’entreprendre se fait une nouvelle fois sentir. Il faut dire qu’entre temps, l’industrie du jeu vidéo a largement évolué, fractionné entre différents corps d’activité bien distincts comme le jeu sur navigateur, le jeu mobile, le jeu console ou encore les jeux utilisant Facebook comme principale plateforme. C’est ce dernier segment qui sera visé par Paananen et ses associés, sans doute impressionnés par la montée en puissance rapide de Zynga.

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… et inversement

500 000 euros injectés par les deux hommes, 400 000 de plus grâce à un prêt souscrit dans le cadre d’un programme de développement local, une somme inconnue par le VC finlandais Lifeline Venture puis 750 000 supplémentaires en capital d’amorçage, glanés à l’international : SuperCell naît sous les meilleurs auspices financiers, dans la ville d’Espoo qui jouxte la capitale Helsinki. Développé en huit mois à peine, Gunshine.net sort en février 2011. Il s’agit d’un jeu de rôle en ligne gratuit disponible sur Facebook qui connaît un bon démarrage public compte tenu de la réputation mesurée de son studio : pas moins de 500 000 joueurs actifs se réunissent chaque mois sur le titre, pensé pour être jouable en cross platform sur navigateur, tablette et smartphone. 

Gunshine.net est un MMORPG ambitieux, tué dans l’œuf faute de potentiel (crédit : SuperCell)

Gunshine.net est un MMORPG ambitieux, tué dans l’œuf faute de potentiel (crédit : SuperCell)

Le fonds américain Accel Partners, qui a déjà financé l’autre startup finlandaise en vue Rovio (Angry Birds), croit suffisamment en SuperCell pour injecter 8 millions d’euros de cash dans l’entreprise. Une somme impressionnante qui n’empêche pas Ilkka Paananen d’analyser froidement le potentiel du premier jeu de sa boîte, dont la faible perspective de croissance et sa difficulté à être porté sur support tactile questionnent en interne. Lorsque Gunshine.net est arrêté, le 30 novembre 2012, voilà déjà presque un an qu’aucune mise à jour n’a été publiée par SuperCell. Ne souhaitant pas rester dans l’ombre de Zynga, le studio est déjà passé à autre chose. Et ce n’est pas forcément du goût de tous ses investisseurs.

Battle Buddies : un des nombreux jeux abandonnés par SuperCell (crédit : SuperCell)

Battle Buddies : un des nombreux jeux abandonnés par SuperCell (crédit : SuperCell)

Passé du mobile avec Sumea au réseau social avec SuperCell, Paananen opère le chemin inverse début 2012 : fascinée par l’écran tactile de l’iPad, sur lequel elle s’est cassée les dents pour le portage de son premier titre, l’équipe souhaite investir pleinement ce nouveau dispositif, sorti début 2010. Mais pour cela, elle doit faire table rase des projets crossplatform en cours pour se concentrer sur des concepts jouables exclusivement au tactile, tout en s’imposant des rapports d’étape réguliers afin de satisfaire ses argentiers, qui s’interrogent en coulisse sur le manque de continuité de l’activité de l’entreprise. Cinq équipes se mettent donc au travail, pour autant de projets prometteurs à destination des tablettes et mobiles du monde entier.

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Pas d’état d’âme jusqu’au succès

Le premier à voir le jour est Pets Vs Orcs, un jeu de gestion et de stratégie qui mélange des animaux mignons et des orcs répugnants. Sans coup férir, le projet est abandonné à peine un mois après sa mise en ligne. En juillet 2012, rebelote avec Battle Buddies. Malgré un accueil positif de la critique, le jeu de rôle orienté action semble trop compliqué à monétiser et se voit tué dans l’œuf. Entre-temps, un certain Hay Day s’est heureusement montré plus convaincant pour SuperCell : comparable au célèbre FarmVille de Zynga, ce jeu de gestion agricole est la première production de SuperCell à connaître un lancement mondial couronné de succès.

Toute ressemblance avec le jeu FarmVille de Zynga ne serait que purement fortuite (crédit : Mobygames)

Toute ressemblance avec le jeu FarmVille de Zynga ne serait que purement fortuite (crédit : Mobygames)

Développé en six mois sur les cendres d’un précédent projet prévu sur Facebook nommé Magic, un certain Clash of Clans voit le jour au mois d’août 2012. En trois mois, ce jeu de stratégie en temps réel massivement multijoueur devient un véritable phénomène. Il s’impose tout simplement comme le jeu le plus rentable au monde en 2013 et 2014, et permet à SuperCell de se faire enfin un nom sur la grande scène du jeu vidéo. Outre l’ouverture de bureaux dédiés au marketing à San Francisco, ce succès permet également au développeur de se relocaliser à Helsinki, dans des locaux enfin à la hauteur de ses effectifs et de ses ambitions.

De 101 millions de dollars de chiffre d’affaires en 2012, le studio atteint 892 millions l’année suivante. 2,44 millions de dollars par jour avec deux jeux : le succès est colossal et attire l’attention de l’éditeur japonais GungHo Entertainment, dont le RPG match-3 Puzzle & Dragons fait les beaux jours. Outre l’opportunité de nouer un partenariat d’envergure entre Puzzle & Dragons et Clash of Clans, ce rapprochement permet à Paananen de rencontrer le patron de SoftBank, dont le frère est le CEO de GungHo. Le géant japonais des télécoms et internet ne tarde pas à agir, en mettant 1,1 milliard d’euros sur la table pour récupérer 51 % des parts de SuperCell. C’est, à l’époque, le plus gros montant pour le rachat d’une entreprise finlandaise. 

Une culture tournée vers l’extérieur

Arrêtons-nous un instant sur la culture de SuperCell, qui atteint le statut de licorne avec seulement deux jeux à son actif. « La première leçon que j’ai apprise avec le temps, c’est que tous les meilleurs jeux sont créés par les meilleures personnes » déclare Ilkka Paananen à Wired en 2013. « Cela peut paraître simpliste et naïf, mais c’est comme ça. Nous rêvions d’une entreprise qui abolisse les process, la bureaucratie. Où les meilleures personnes pourraient se concentrer sur ce qu’elles font de mieux. Être créatives et construire des jeux ». 

Un crédo qui se concrétise dans l’organisation de l’entreprise, en cellules de 7 personnes maximum, la plupart du temps sans Game Designer, car « c’est la responsabilité de tout le monde ». Ces entités se fixent elles-mêmes leurs délais avant de présenter le fruit de leur travail au reste de l’entreprise. Le destin du jeu est alors fixé collectivement : s’il est amusant, le projet continue. Sinon, il est arrêté. Dans ce cas, on débouche le champagne pour célébrer, car « chaque échec est une opportunité unique d’apprendre, et chaque leçon nous rend meilleurs ». 

Chez SuperCell, on fête les succès comme les échecs : avec du champagne (crédit : SuperCell)

Chez SuperCell, on fête les succès comme les échecs : avec du champagne (crédit : SuperCell)

Des aphorismes comme « on ne conçoit pas un jeu à partir d’un tableau excel » ou « les jeux vidéo sont une forme d’art, pas une science » ponctuent les sorties publiques d’Ilkka Paananen, dont les salariés louent la vision, mais également l’humilité et l’accessibilité. Pas d’optimisation fiscale (SuperCell paie 345 millions de dollars de taxes en Finlande en 2013) pour « rendre à la communauté ce qu’elle nous a donné », et la volonté chevillée au corps d’aider la société dans son ensemble. 

C’est porté par ce philanthropisme concret que SuperCell viendra en aide aux jeunes réfugiés avec sa propre fondation, Me, à hauteur de 2,5 millions d’euros en 2015. Une collecte de matériel informatique pour les plus démunis, une école pour apprendre à coder, un partenariat avec une association pour aider les personnes en situation de handicap via le jeu vidéo… SuperCell sait se rendre utile au-delà de la simple création de divertissement.

Une affaire qui roule, ou presque

De 70 environ, les effectifs passent à 138 personnes début 2014, notamment suite à l’ouverture de succursales en Corée du Sud et au Japon. Un nouveau titre franchit enfin les bureaux de SuperCell : Boom Beach sort en mars et si ses débuts sont prometteurs, le jeu de stratégie militaire a besoin d’un gros push marketing pour s’imposer sur la durée. Une pratique que maîtrise le studio, prêt à dépenser 9 millions de dollars pour un spot publicitaire diffusé à la mi-temps du Superbowl en 2015.

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Doublé entre 2013 et 2014 (de 892 millions à 1,77 milliard de dollars), le chiffre d’affaires s’établit à 2,3 milliards pour les deux exercices suivants, pour environ 800 millions de bénéfices. En parallèle, SoftBank augmente ses parts dans SuperCell à hauteur de 73,2 %, sans pour autant céder à quelconque interventionnisme malvenu. D’autant plus que Boom Beach sort en Chine fin 2015 et qu’un nouveau titre, Clash Royale, voit le jour en janvier 2016. Les perspectives sont réjouissantes côté finances, ce qui incite le géant Tencent à initier un consortium pour racheter l’ensemble des parts de SoftBank. Montant de la transaction : 8,6 milliards de dollars

Inaugurés en 2021, les derniers locaux en date de SuperCell sont majestueux (crédit : Valoa)

Inaugurés en 2021, les derniers locaux en date de SuperCell sont majestueux (crédit : Valoa)

Une stratégie qui atteint ses limites ?

Un léger déclin semble s’amorcer à partir de 2017. Clash Royale, Tower Defense où deux joueurs s’affrontent à l’aide de cartes permettant d’envoyer des troupes sur un champ de bataille composé de deux lignes, connaît certes un excellent démarrage mondial. Combinée à l’arrivée du jeu d’action multijoueur en temps réel Brawl Stars, mi-2017, ce nouveau succès de SuperCell ne parvient pas à compenser complètement l’affaissement des performances de la locomotive Clash of Clans. Le chiffre d’affaires décline jusqu’à la pandémie de COVID-19, dont profite SuperCell comme le reste de l’industrie du jeu vidéo pour se refaire une santé.

Statistic: Revenue generated by Supercell from 2012 to 2023 (in million U.S. dollars) | Statista
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Les raisons sont multiples : concurrence devenue féroce, metas moins engageantes pour la communauté qui se traduit par une baisse substantielle des microtransactions, lassitude générale vis-à-vis du modèle Pay To Accelerate, difficulté de développer de nouveaux titres tout en créant du contenu pour l’existant… Contrairement à la plupart des autres éditeurs de jeux vidéo, SuperCell ne panique pas quand un de ses titres marque le pas : plutôt que tirer sur la corde en incitant toujours plus sa communauté à passer à la caisse, le studio préfère miser sur le long terme en tentant d’imaginer des façons de rallumer la flamme du fun. Une attitude qui lui permet, avec seulement 6 jeux disponibles contre 13 arrêtés rapidement (en plus des dizaines jamais sortis), de garder la confiance de sa base d’utilisateurs. 

Conclusion

À plusieurs reprises, le destin de SuperCell aurait pu basculer. Grâce à la qualité de son travail, sa culture d’entreprise tournée vers la confiance et des partenaires financiers peu intrusifs, le studio finlandais est parvenu à garder son cap malgré les nombreux obstacles qui se sont dressés sur sa route. 625 salariés, 200 millions d’utilisateurs mensuels actifs, 10 milliards de dollars de chiffre d’affaires pour Clash of Clans, aucun licenciement massif ces deux dernières années : si SuperCell est un modèle pour l’industrie du jeu vidéo, c’est aussi parce que sa figure de proue, Ilkka Paananen, ne rechigne jamais à partager sa vision pour emmener ses équipes avec lui sur le long terme. Quitte à remettre en question l’ensemble de son modèle.

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FAQ

Combien a rapporté Clash of Clans ?
Clash of Clans est le plus grand succès de SuperCell. Il aurait généré plus de 10 milliards de dollars de chiffre d’affaires en dix ans d’activité, et dispose d’une base d’utilisateurs actifs mensuels de 75 millions en 2024.
Qui possède SuperCell ?
L’entreprise chinoise Tencent possède 84,3 % des parts de SuperCell. À la tête d’un consortium, il a acquis la participation de la société japonaise SoftBank (73,2 %), en juin 2016, à laquelle s'ajoutent des parts préalablement acquises. Ilkka Paananen dispose certainement toujours d’une part importante du reste de l’entreprise, tout comme son compère Mikko Kodisoja, même si ce dernier a quitté SuperCell en 2020.
Quel est le dernier jeu sorti de SuperCell ?

Le jeu de combat Squad Busters est le dernier jeu en date de SuperCell. Disponible dans le monde entier depuis le 29 mai 2024, il a passé plus d’un an en beta fermée au Canada avant de voir le jour dans le reste de la planète. Il met en scène des personnages célèbres du studio finlandais, tirés des jeux Clash of Clan, Hay Day ou encore Brawl Stars.

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