L’histoire de Toru Iwatani, le père de Pac Man

Aujourd’hui âgé de 70 ans, Toru Iwatani est né à Meguro, une ville proche de Tokyo. Après avoir terminé le lycée, il intègre l’école d’ingénieur de Tokai University. Malgré ses études d’ingénieur, l’homme est autodidacte en programmation. Il n’avait aucune notion en informatique ni en design. Passionné de manga, il intègre Namco à l’âge de 22 ans.

Toru Iwatani avait plutôt un tempérament rebelle pour un jeune de son époque. Il écoutait du rock américain et se passionnait pour le flipper. Lors de sa dernière année à l’université, il doit trouver un emploi pour parfaire sa formation. À la même période, Namco recrutait au poste de « création de jeu ».

Embauché chez Namco, Toru Iwatani espérait travailler sur les flippers. Pourtant, l’entreprise n’avait pas le droit pour des raisons juridiques liées aux brevets. Il était assigné à la réparation des machines. Après plusieurs mois dans l’entreprise, il est sollicité pour créer un jeu d’arcade. Il s’agit de Gee Bee, sa première création. Pour ce titre, il est largement inspiré de Breakout d’Atari. Le jeu aura deux suites : Cutie Q et Bomb Bee malgré un succès en demi-teinte.

Alors que Space Invaders de Taito envahit les salles d’arcade, Namco peine à se faire une place sur ce marché. L’entreprise se contente de traduire les instructions des jeux Atari en japonais. Les jeux d’arcade qu’elle a développés ne rencontrent pas le même succès que ceux des concurrents.

Par ailleurs, les salles d’arcade sont vite devenues un lieu très masculin et théâtre de troubles. L’ambiance fait fuir le public féminin et les couples. C’est dans ce contexte que Toru Iwatani souhaite proposer un jeu qui plait autant aux hommes qu’aux femmes.

Toru Iwatani explique qu’il devait penser à ce que les femmes aiment : la mode, les histoires d’amour, etc. Finalement, il penche pour la nourriture parce que sa femme aime manger. Ce thème de la nourriture se trouve dans le nom initial du jeu : Puck puck qui se traduit par « munch munch » en anglais américain. Néanmoins, l’éditeur américain, Midway Games, fait le choix judicieux de changer le nom pour éviter les dérives de jeux de mot avec « puck ». C’est ainsi que le jeu porte officiellement le nom « Pac-Man » et il est resté.  

Toru Iwatani a fait en sorte de proposer un gameplay simple : un personnage dont l’objectif est de manger tout en évitant les fantômes dans un labyrinthe. Lorsque Pac Man mange tous les points, il accède au niveau suivant.

Le test du jeu est lancé en 1980 au Japon. Il reçoit un accueil mitigé dans les salles d’arcade japonais. Un autre jeu de Namco, Galaxian le supplante même dans les salles d’arcade grâce à sa cible masculine. Néanmoins, Pac Man poursuit discrètement son ascension pour devenir le jeu d’arcade le plus rentable du Japon en 1980. Il détrône même Space Invaders qui détenait ce titre les deux années précédentes.

Aux États-Unis, Midway fait également preuve de prudence en fabriquant seulement 5 000 unités. Le succès est inattendu. Le jeu génère 8,1 millions de chiffres d’affaires par semaine aux États-Unis. Plus de 100 000 bornes d’arcade sont vendues en un an. Avec un milliard de dollars par trimestre, le jeu a même dépassé Star Wars en termes de revenu.

Au vu des milliards que Pac Man a rapportés, on pourrait croire que cela a changé la vie de Toru Iwatani. Pourtant, interrogé par la journaliste Helen Pfeffer, le développeur concède qu’il n’a reçu aucune récompense. Même en tant qu’employé, il n’a pas reçu d’augmentation ou de bonus. Selon lui, c’est une pratique courante dans les entreprises japonaises. Cela ne lui posait pas de problème.

Après la sortie de Pac Man, Toru Iwatani a arrêté de créer des jeux. Dans une interview, il explique que le jeu a permis à Namco de se développer. Cela lui a valu une promotion en tant que producteur, un poste éloigné de la création.

Après 30 ans chez Namco, Toru Iwatani quitte l’industrie des jeux vidéo pour embrasser une carrière dans l’enseignement en 2006. Dans une interview accordée à Weekly Famitsu, il explique qu’il a commencé à donner des conférences régulièrement à l’Université polytechnique de Tokyo (TPU), puis dans d’autres universités.

Il a constaté la passion de la jeune génération pour les jeux vidéo et l’importance de l’enseignement. Lorsque TPU ouvre un département sur les jeux vidéo, il accepte d’y consacrer à plein temps. Malgré son envie de poursuivre la conception, il estime qu’il était nécessaire de transmettre ses 30 ans d’expériences à la génération suivante.

Sa décision intervient dans un contexte où la formation aux jeux vidéo est en crise au Japon. En effet, le pays se fait distancer par les États-Unis, la Chine, l’Europe et même la Corée du Sud qui sont à l’avant-garde dans le domaine de l’éducation.

En dehors de Pac Man et ses suites et dérivés, Toru Iwatani est crédité en tant que game designer ou producteur sur les jeux suivants :

• Bomb Bee (1979),
• Cutie Q (1979) ;
• Pole Position (1982),
• Libble Rabble (1983),
• Quester (1987).

Néanmoins, ces jeux n’ont pas connu autant de succès que Pac Man.