Monteur son

Métier

Dans le monde du gaming, le Monteur son fait partie des experts qui travaillent en étroite collaboration avec les équipes de développement et de direction artistique pour donner vie aux paysages sonores.

Sylvain Manset est monteur depuis une quinzaine d’années. Il a débuté sa carrière en tant qu’indépendant, avant de rejoindre les équipes d’un développeur parisien « pour plus de stabilité ». C’est auprès d’une des plus belles références du secteur, Ubisoft Canada, qu’il a poursuivi son chemin.

Il explique : « Contrairement aux films, où le son est linéaire, les jeux vidéo demandent une approche dynamique, car le son doit réagir aux actions du joueur en temps réel. Le travail du monteur son, c’est de tout bien caler, pour dire les choses très simplement. Plus précisément, le but est d’anticiper les interactions du joueur pour que chaque effet sonore tombe au bon moment et crée une ambiance qui fonctionne. C’est la partie la plus minutieuse de mon travail. Lorsqu’on travaille sur une ambiance sonore, on est en règle générale sur de plus grandes couches : on pose un plus gros morceau de son sur le projet et, même si des ajustements, des twists et des coupures sont nécessaires, la tâche a quelque chose de plus simple. Bien sûr, pour les bruitages, il y a une automatisation : une fois qu’on a calé le bruit de pas sur l’action de déplacement, cette connexion son-image peut être reproduite à l’infini. On ne va pas répéter l’action à chaque fois. Mais caler le premier couplage, en être vraiment satisfait, ça demande parfois d’avoir des doigts de dentellière ! ».

Missions

Le Monteur son est chargé de sélectionner, d’assembler et d’éditer les différents éléments sonores (comme les dialogues, les effets sonores, les ambiances) d’un jeu. « C’est lui qui construit en quelque sorte la bande sonore brute d’un projet », explique Sylvain Manset. « Le Monteur son assure que les sons nécessaires sont présents, correctement positionnés et cohérents avec l’image et la narration du projet ».

Ses tâches incluent :

1. La recherche et la capture d’effets sonores spécifiques;
2. L’édition et l’assemblage des pistes audio pour correspondre aux séquences visuelles ;
3. La préparation des éléments sonores qui seront ensuite optimisés par le mixeur.

Monteur son et mixeur son : quelle différence ?

La différence entre un Monteur son et un Mixeur son réside principalement dans la nature et la phase de réalisation de leur travail dans le processus de production audio.

Le Monteur son intervient en amont dans la chaîne de production sonore. Le Mixeur son intervient après ce dernier « pour finaliser et équilibrer la bande sonore », précise Sylvain Manset. « Il y a souvent une confusion sur le rôle de ces deux intervenants, surtout auprès des jeunes en tout début de formation… mais aussi parmi certains commanditaires qui partent à la chasse au freelance en s’emmêlant un peu les pinceaux, parfois ! ».

Le Mixeur prend les éléments préparés par le monteur et ajuste leur volume, leur fréquence et leur spatialisation pour obtenir un mixage harmonieux et clair. Il s’assure que chaque élément sonore est bien audible sans prendre le pas sur les autres, créant ainsi une écoute agréable et équilibrée.

Ses tâches incluent :

1. L’équilibrage des niveaux de chaque piste (dialogues, musique, effets) ;
2. L’application de traitements (comme la compression, l’égalisation et la réverbération) ;
3. La cohérence sonore du projet pour que l’expérience auditive soit fluide et immersive.

En résumé, le Monteur son prépare et organise les éléments sonores, tandis que le Mixeur son les affine et les harmonise pour obtenir une bande sonore cohérente et immersive.

Les responsabilités du Monteur son

Pour Sylvain Manset, « le Monteur son a la responsabilité d’apporter la matière première de la plus haute qualité possible au Mixeur, pour que celui-ci puisse assembler les briques et créer un univers propre, convaincant, prenant. J’aime bien dire que je suis celui qui va au marché et prédécoupe les aliments. Et c’est le Mixeur qui va préparer un plat avec tout ce que j’aurai pu choisir et préparer ».

Compétences

Un bon Monteur son doit posséder un éventail de compétences techniques et artistiques spécifiques pour répondre aux besoins immersifs de l’audio interactif propre au gaming.

Voici les compétences clés pour exceller dans ce métier :

Compétences techniques

1. Maîtrise des logiciels audio et de montage :

• La connaissance approfondie de logiciels comme Pro Tools, Logic Pro ou Cubase est essentielle pour l’édition et le montage des pistes sonores. Ces logiciels permettent de nettoyer, ajuster et synchroniser les sons en fonction des besoins du projet.
• En plus de ces logiciels de montage, une maîtrise des middleware audio comme FMOD et Wwise est indispensable pour intégrer les sons dans les moteurs de jeu (Unity, Unreal Engine). Ces outils permettent de lier les effets sonores aux actions du joueur pour une expérience interactive.

2. Compréhension de l’acoustique et de la spatialisation sonore :

• Savoir gérer l’acoustique et spatialiser le son est crucial pour offrir une expérience immersive. La spatialisation 3D, qui place les sons dans l’espace, crée une ambiance réaliste où le joueur perçoit les effets sonores comme s’ils se produisaient autour de lui.

3. Techniques de prise de son et de création d’effets :

• Le monteur son doit savoir capturer et créer des effets sonores uniques, que ce soit par enregistrement direct ou via la manipulation de bibliothèques sonores. Cela inclut des compétences en prise de son et en modification des sons pour les adapter à l’univers du jeu.

4. Connaissance des moteurs de jeu :

• Une compréhension des moteurs de jeu comme Unity ou Unreal Engine permet de mieux intégrer les effets sonores et de collaborer efficacement avec les équipes de développement.

Compétences créatives

1. Créativité et sens artistique :

• Concevoir des sons originaux et adaptés à l’atmosphère du jeu demande une grande créativité. Le monteur doit savoir interpréter la vision artistique pour imaginer des sons qui enrichissent le gameplay et soutiennent la narration.

2. Capacité à anticiper les besoins sonores en fonction du gameplay :

• Comprendre la dynamique de jeu et les attentes des joueurs permet d’anticiper les effets sonores nécessaires. Cela inclut la capacité de créer des sons interactifs qui changent en fonction des actions du joueur.

Qualités

Le Monteur son doit aussi pouvoir mobiliser des compétences personnelles. Parmi les qualités incontournables, Sylvain Manset évoque le souci de la précision et le sens du détail : « Encore une fois, cela tient au cœur même de notre métier : monter, c’est faire en sorte que les effets sonores soient parfaitement calés pour correspondre à l’image et à l’action ».

Il mentionne également la capacité d’adaptation et de bonnes dispositions pour la collaboration, ainsi qu’une bonne communication. « Tous les métiers de l’image ou du son (ou presque) sont des métiers de travail en équipe. On crée ensemble. Il faut avoir en permanence les yeux et les oreilles à l’affût pour intégrer les remarques des développeurs, des graphistes et des directeurs artistiques. Et puis un projet de jeu, c’est aussi beaucoup de changements en cours de route ; c’est une option à laquelle on croyait dur comme fer et puis qu’on va réadapter : il faut donc être patient, savoir effacer son travail et recommencer – en un mot, savoir s’adapter ».

Niveau d’études nécessaire

Comme pour la très grande majorité des métiers de spécialistes du son, les missions de Monteur son sont accessibles à partir d’une formation de type Bac +2. 

Quelle formation ?

Les formations pertinentes pour se préparer aux métiers du son avec un axe « jeu vidéo » sont multiples.

On pourra notamment envisager les pistes suivantes :

1. Un BTS Métiers de l’Audiovisuel (option Son) : Ce diplôme Bac+2 offre une base technique solide en enregistrement et traitement du son.
2. Une Licence professionnelle Techniques du Son et de l’Image : Idéale pour se spécialiser dans le son pour les médias numériques et interactifs.
3. Un Master en Sound Design : Certaines écoles comme l’ENJMIN ou l’ESRA proposent des masters spécialisés en sound design pour le jeu vidéo.
4. Des formations et certifications complémentaires en middleware : Des certifications en logiciels comme Wwise et FMOD permettent de se spécialiser dans l’intégration audio en temps réel.
5. Un cursus complet en école spécialisée dans le gaming, en choisissant des options « Travail du son ».

Les entreprises qui recrutent

En 2023-2024, parmi les entreprises spécialisées dans le jeu vidéo, des besoins de personnes qualifiées en mixage ont été repérés chez :

1. Ubisoft – L’un des leaders mondiaux du jeu vidéo, connu notamment pour ses titres Assassin’s Creed ou Far Cry.
2. Focus Home Interactive – Acteur important de l’édition et du développement de jeux vidéo, Focus collabore avec divers studios français et recherche des talents audio pour optimiser l’expérience sonore dans ses projets variés.
3. Asobo Studio – Situé à Bordeaux, Asobo est reconnu pour des jeux innovants comme Microsoft Flight Simulator et A Plague Tale. Ce studio mise sur des environnements sonores de haute qualité.
4. Quantic Dream – Spécialisé dans les jeux narratifs et immersifs (Detroit: Become Human, Heavy Rain), Quantic Dream est basé à Paris et valorise l’expertise sonore pour créer des expériences émotionnellement engageantes.
5. Banijay Group – pour des développements de jeux vidéo basés sur ses programmes télévisés.

Salaire

Le salaire d’un Monteur son spécialisé dans le jeu vidéo varie selon l’expérience du professionnel et la taille du studio qui s’attache ses services.

Pour un profil débutant, il faut compter en général entre 2 000 et 2 500 euros bruts par mois, soit entre 24 000 et 30 000 euros à l’année.

Pour un profil confirmé, le salaire brut moyen se situe entre 3 000 et 4 500 euros par mois, soit environ 36 000 à 54 000 euros bruts par an.

Un Monteur exerçant en freelance pourra pratiquer des tarifs journaliers entre 250 euros par jour pour un profil peu expérimenté et 400 euros par jour pour un professionnel confirmé.

Ces salaires sont parfaitement alignés avec ceux en pratique pour les Mixeurs son.

À noter que des rémunérations plus importantes restent possibles lorsqu’un grand studio est aux manettes et que le projet porté est promis à un fort impact commercial.

Évolution de carrière

Un Monteur son peut évoluer vers divers postes comme :

1. Sound Designer, avec une responsabilité accrue sur l’aspect créatif de la bande-son ;
2. Chef de projet audio, avec des responsabilités accrues, mais sur le plan managérial, avec la gestion de l’équipe sonore sur des projets de grande envergure ;
3. Directeur audio, pour la supervision de la direction artistique sonore sur l’ensemble d’un projet ;
4. ou encore Mixeur son, pour intervenir sur un autre aspect de la création sonore. Cela suppose de suivre des formations adéquates.

Le professionnel peut aussi choisir de passer en freelance, ce qui lui permettra d’avoir une plus grande liberté dans le choix de ses projets.

Les avantages et inconvénients

Pour Sylvain Manset, la position de Monteur son « permet d’échapper aux phases les plus stressantes de la conception de jeu, tout en restant parfaitement intégré dans le processus créatif. Bien sûr, on reste soumis aux impératifs des délais et il existe toujours une possibilité de se voir demander des changements dans les bases de son qui sont utilisées. Mais, en tant que monteur, on est plutôt à l’abri des grands coups de rush et des peaufinements en urgence. Cela n’empêche pas que l’exigence de qualité vaut pour toute la chaîne créative, monteur compris ! Et quand on parle jeu vidéo, les exigences en matière de qualité sont souvent élevées, petit ou grand studio ! ». 

Le Monteur salue également la diversité des projets et la satisfaction qu’apporte « ce bon équilibre entre l’intervention créative et le processus de gestion des éléments sonores, avant passation au Mixeur, qui pour moi est un peu de la logistique ».

« Les plus grands désavantages ou plutôt les défis, je les vois dans le choix d’être freelance : il y a l’irrégularité du volume de travail, certes, mais aussi les variations dans la qualité des projets qu’on traite, mais aussi et surtout des horaires de travail très changeants, avec souvent des nuits blanches parce que les commanditaires ont pas mal de pouvoir sur vous et que travailler en équipe à distance, ce n’est pas toujours facile, d’autant plus quand on est sur du créatif ! », conclut Sylvain Manset.